Laurent Daudet, PDG de LightOn : « Allons-nous vendre notre âme à l’IA ? »
A l’occasion de Rousson Jeunesse 2024, Laurent Dousset, fondateur et PDG de LightOn, entreprise basée dans la recherche et la création du domaine de l’IA, était l’invité du festival. L’occasion d’aborder les enjeux de son métier mais aussi présenter sa bande-dessinée, co-réalisée avec Appupen, célèbre dessinateur indien. Le PDG de LightOn a rappelé qu’il était important de « faire en sorte que les gens se posent les bonnes questions » à propos de l’IA.
L’Intelligence artificielle, révolution ou destruction technologique ?
Des discussions animées sur les défis et les opportunités que présente cette technologie émergente qu’est l’IA, voilà à quoi l’on pouvait s’attendre pour cette entrevue.
Laurent Daudet a souligné que malgré les avancées spectaculaires réalisées dans le domaine de l’IA, il restait encore beaucoup à accomplir avant que « les machines ne puissent rivaliser avec l’intelligence humaine ». Bien que les IA puissent sembler puissantes, elles sont encore loin de posséder une véritable intelligence puisqu’en effet, les machines actuelles ne possèdent ni conscience ni capacité à raisonner de manière autonome. « Sur une échelle de un à dix, où un représente une machine complètement stupide et dix une machine dotée d’une intelligence proche de celle humaine, j’estime que les IA actuelles se situent autour du niveau deux ou trois », a nuancé le PDG de LightOn.
Les intervenants ont également abordé les implications sociales de l’IA, exprimant des préoccupations quant à son impact sur le marché du travail et la vie quotidienne. Ils ont souligné la nécessité de réglementer cette technologie émergente pour éviter les abus et les conséquences imprévues.
« Sur une échelle de un à dix, où un représente une machine complètement stupide et dix une machine dotée d’une intelligence proche de celle humaine, j’estime que les IA actuelles se situent autour du niveau deux ou trois », a nuancé le PDG de LightOn.
La vitesse à laquelle l’IA se développe a été également abordée, avec des implications profondes sur la manière dont nous interagissons avec les machines. A une ère où certains expriment inconditionnellement leur optimisme quant aux nouvelles possibilités offertes par l’IA, d’autres ont mis en garde contre les risques d’une adoption précipitée et incontrôlée de cette technologie. Pour Laurent Daudet, la nécessité d’une réflexion approfondie sur les usages de l’IA et d’une régulation appropriée est plus que fondamentale car cet outil (comme l’arrivée d’Internet, qu’il pense « moins impactante ») est devenu précis et viral bien plus rapidement que l’arrivée du numérique.
Plus largement, Laurent Daudet a aussi abordé la relation entre les nouvelles générations, l’intelligence artificielle et la relation aux fake-news : « Ça va être de plus en plus naturel ; l’IA c’est aussi très utile pour tout ce qui est lutte contre les fake news qui vont être aussi de plus en plus présentes », rappelle le patron de LightOn, tout en nuançant que « les fake news ont pas attendu l’IA, mais cette technologie leur a permis de prendre une plus grande ampleur ». Cette pensée résonne d’ailleurs à l’heure où les Etats et les compagnies investissent massivement dans ces nouveaux programmes de langage, « pour des raisons politiques, militaires, mais aussi pour les questions liées au développement durable » rappelle-t-il.
Créer et dessiner une BD avec une IA, c’est possible ?
Une des discussions les plus animées de la conférence a tourné autour du livre de Laurent Dousset, dessiné par l’artiste indien Appupen, qui a été réalisé en partie par une intelligence artificielle. Cette initiative a suscité un vif intérêt parmi les participants qui n’ont pas manqués, par leurs questions, d’alimenter une réflexion profonde sur le rôle émergent de l’IA dans le domaine de la création littéraire.
Laurent Daudet a pris soin de mettre en lumière les implications fascinantes de cette expérience. L’incorporation de l’IA dans le processus créatif remet en question les frontières traditionnelles de la création artistique et soulève des interrogations profondes sur la nature même de l’inspiration et de la production artistique. Dans son cas, seule la fin a été faite par une IA : « Puisque nous avions décidé de parler d’IA, il nous semblait vraiment pertinent, et même intéressant d’intégrer cet outil dans le processus d’écriture et de mise en dessin ». Car oui, les dernières pages ont été illustrées par un robot, nourri et même gavé avec des centaines de planches de dessins d’Appupen, « pour qu’elle cerne son style » ajoute Laurent Daudet.
Certains ont salué cette initiative comme une évolution naturelle de l’outil créatif de l’écrivain, offrant de nouvelles perspectives et des possibilités d’exploration inédites. D’autres, en revanche, ont exprimé des préoccupations quant à l’impact potentiel de l’IA sur le caractère unique et l’authenticité de l’œuvre littéraire.
La conversation s’est ensuite enrichie de perspectives variées sur la manière dont le public perçoit et interagit avec les œuvres créées en partie par des IA. Certains participants ont d’ailleurs manifesté leur fascination pour les possibilités offertes par celle-ci en matière de création artistique, soulignant son potentiel à repousser les limites de la créativité humaine. D’autres ont souligné l’importance de préserver « la dimension humaine de l’expression artistique », mettant en avant la profondeur émotionnelle et la sensibilité unique que seule l’œuvre humaine peut véhiculer.
Le conférencier a enfin soulevé des questions sur les limites de l’IA en tant qu’outil créatif. Car si celles-ci sont capables de générer du contenu de manière efficace, elles peinent souvent à saisir la complexité émotionnelle et la subtilité de l’œuvre humaine. Monsieur Daudet a tout de même insisté sur la nécessité de trouver un équilibre entre l’utilisation comme outil créatif et le maintien des éléments essentiels de l’expression artistique humaine.
En explorant les intersections entre l’IA, ses multiples enjeux (par exemple la création littéraire), la conférence a offert un espace certain pour réfléchir aux défis et aux opportunités que cette convergence présente pour le monde de l’art et de la culture. Une véritable discussion avec un des patrons français de l’IA, exceptionnellement de passage dans les Cévennes : “une si belle région” a conclu le PDG de LightOn avec un petit sourire.